Aujourd’hui Ally m’emmène faire la rencontre de son père et sa belle mère à Mwanga, au pied des monts Pare, à une centaine de kilomètres au sud est de Moshi.
Ça me rappelle Ndareda, avec un peu plus d’activité. Mais ici il ne semble pas souvent y avoir de Mzungu qui s’arrête. Je suis une bête curieuse, et pourtant les passants ne me prêtent pas grande attention. Comme c’est bon et rare de se sentir une personne parmi d’autres!
Nous rendons visite au père d’Ally dans sa petite boutique. Il vend des chaussures depuis son plus jeune âge. Il a même eu un magasin à Mombasa, avant de revenir dans sa région natale. Ally m’explique qu’il a eu cinq femmes, dont la mère d’Ally qui est restée vivre au Kenya. Pour ses vieux jours, il a choisi de s’installer avec sa deuxième femme avec qui il a élevé le plus d’enfants.
Ils vivent dans une maison grande mais simple, avec leurs deux filles et petits enfants. La mama nous prépare un samaki-ugali (poisson et foufou) puis nous allons nous promener dans les rues terreuses, à la rencontre des habitants, et finissons par l’échoppe de vêtements de la demi-soeur d’Ally.
Les photos sont de très mauvaise qualité car j’ai volontairement oublié mon ostentatoire Nikon. Me balader sans appareil photo est assez libérateur: je ne me sens pas l’obligation de capturer le plus beau regard sous le plus bel angle. Là, j’ai un téléphone, je fais quelques photos souvenirs, comme ça, sachant qu’elles seront trop pourries pour les publier sur un blog. Ah! Mais?
La sœur d’Ally est adorable à tous points de vue, jolie, attentionnée, souriante, malgré une vie pas si simple.
A présent, il faut rentrer, car je dois préparer mon sac pour… le Kilimanjaro.
Je me répète ce nom mentalement toute la soirée. J’ai du mal à croire que je m’apprête à le gravir. Ce massif légendaire, dont le nom m’évoque la couverture d’un livre d’Hemingway, et la toile de fond de l’histoire de Patricia et son lion chez Kessel, ce « toit de l’Afrique » et ses « neiges éternelles »; ce vieux volcan gravé dans l’histoire coloniale, ce bougre qui s’est dissimulé pendant toute la durée de mon premier voyage et m’a dévoilé sa crête par dessus les nuages, le jour de mon départ précipité vers le cercueil de mon père; sa discrète silhouette se dévoilant presque en transparence les jours de très beau temps, comme pour signifier que laisser apparaître son blanc mamelon sur un cliché est un peu trop osé…
Ce monstre enfin, qui la semaine dernière, je l’apprends donc la veille de l’affronter, a eu raison de deux trekkeurs, comme chaque année vingt cinq n’en reviennent pas. Sur 25 000. Un pour mille. Et moi, moins sportive qu’une trace de bave (oui j’ai mes métaphores personnelles), moi qui ne randonne jamais, à moins qu’à deux heures de marche il y ait une ferme auberge, moi qui ai séché le sport toute mon année de terminale, et n’en ai plus jamais refait, moi qui hait l’absence de végétation, je vais aller à près de 6000 mètres? Laissez moi rire… et en douter… et flipper ma race de façon très contenue!