J 12 Bagamoyo

Bagamoyo, en swahili, ça signifie: « déposer son coeur ». Et c’est littéralement ce qui s’est passé pour nous. Nous voilà sur la route depuis 12 jours avec Stanley, et même s’il m’aide énormément à organiser ce périple, il est assez taciturne et effacé. Mais ça ne va pas durer…

Aujourd’hui nous rencontrons les membres d’une association d’étudiants archéologues qui ont créé un musée de la préhistoire, et sont en train de finaliser le café restaurant du musée.

L’objectif est culturel bien sûr, mais aussi social, puisqu’il s’agit de créer des emplois pour les étudiants (deux guides) et pour des femmes de la ville (des serveuses, une libraire, des vendeuses). Honnêtement le musée est petit mais vraiment on sent l’enthousiasme des étudiants, et ça fait chaud au coeur. A ne pas confondre avec le musée municipal qui relate l’histoire de l’esclavage et qui est aussi fort intéressant !

Après un délicieux repas, comme toujours sur la côte, on va visiter un petit village de pêcheur. Et là on voit quoi? Un monsieur qui repasse dans la rue. C’est son job. Mais surtout, il repasse avec un fer à charbon. Comment se rendre compte des métiers, des moeurs et des astuces d’antan. Une leçon, encore, de ce qu’on appelle maintenant la low-tech finalement. L’huile de coude. Je suis toujours fascinée par les gens qui parlent des Africains (tou un continent quand même!) comme de gens rétifs à l’effort. Alors que notre recherche de confort détruit la planète.

Un bateau de pêche du village

Bagamoyo a le charme des ports de la côte swahilie, un littoral constellé de ruines témoignant des passages de différentes civilisations au fil des siècles. C’est avec regret qu’on quitte la quiétude de ce bout de terre, en se promettant de revenir explorer plus avant les ruines de Kilwa et autres méconnues.

Mais nous avons rendez-vous, près de Morogoro, avec un projet local qui nous a attiré l’oeil, et la désillusion va être à la hauteur de notre enthousiasme… il faut rentrer à la guesthouse.

Plage de Bagamoyo

De retour à Bagamoyo, on va se faire un bon petit repas dans un restaurant local. Et là, ça y est, Stanley lâche quelques mots.  » Tu sais, des projets, j’en ai créé… je me suis tellement impliqué… je peux te raconter. »

De cette soirée, je ne retiens qu’une chose: j’ai découvert un jeune homme au coeur immense. Ce qu’il m’a dit, je ne l’aurais pas imaginé. Comment il n’a toujours eu qu’une idée fixe, aider ses frères et soeurs humains, comment il a tendu la main, comment il a été trahi, comment on lui a volé ses projets pour en récupérer la gloire, comment on en a détourné pour en récupérer les fonds. Comment il doute, aujourd’hui, de rencontrer des personnes sans arrière pensée, généreuses, oeuvrant pour n’avoir que des sourires en retour.

Il m’a ouvert son coeur pour la première fois: il a déposé son coeur à Baga-moyo. La force des symboles. Ce soir là est née une grande amitié, sincère, brute, et qui dure toujours.

4 réflexions sur “J 12 Bagamoyo

  1. Bonjour Stéphanie,
    Quel plaisir d’avoir à nouveau de vos nouvelles, je n’en recevais plus. Je suivais votre blog en 2019 car j’étais très attirée par l’Afrique. Depuis 2018 je m’occupe de jeunes Africains venus tenter leur chance en France (MNA), j’héberge un jeune Malien depuis octobre 2019. Au bout de ces bientôt 2 ans je me questionne sur comment ces jeunes voient l’Europe. Dans une époque ou les moyens de communication sont accessibles à tous, pourquoi ne voient ils pas comment sont traités les migrants dans nos pays dit « civilisés »? Une grande partie de ces jeunes arrivés en France, lorsqu’ils ont atteint leur majorité se retrouve à la rue.
    J’aimerai échanger avec vous sur ce sujet et par votre intermédiaire avec les jeunes que vous côtoyez, en attendant un jour peut-être aller les voir moi-même.
    Amicalement
    Corinne

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    • Bonjour Corinne,

      J’avoue que depuis deux ans, il a été difficile pour moi de tenir à jour mes histoires, tant le quotidien a été chargé, mais j’y reviens !

      Ce dont vous parlez me touche car j’ai été plusieurs fois bénévole pour l’association Utopia 56, à Grande Synthe, à Calais et à Paris porte de La Chapelle, et j’ai accompagné des mineurs en hébergement d’urgence. Ici en Tanzanie, il n’y a pas tant d’essai de rejoindre l’Europe car la vie est relativement bonne, même si le secteur du tourisme a été très touché et donc une certaine pauperisation s’est installée depuis un an. Mais cela reste des demandes par la voie officielle, les visas, peu distribués, et non par les voies dangereuses clandestines.
      Il reste un « rêve » d’Europe car ils reçoivent des visiteurs européens qui ont les moyens de voyager et n’ont pas accès via les médias mainstream à une vision juste de nos sociétés. Les fictions américaines sont prises comme reflet de la réalité. Déjà que nous sommes bercés par nos propres médias dans une réalité fabriquée, comment de l’étranger pourrait-on s’en rendre compte?

      Puis pour les populations migrantes, et vous le savez sans doute, les jeunes qui survivent à destination, comme dans la périphérie de Paris, envoient une image d’épinal à leurs familles pour ne pas les inquiéter.
      Mon mari passe beaucoup de temps à faire comprendre aux jeunes que non ce n’est pas facile de trouver un travail en Europe. Et qu’on n’a pas le droit de faire des petits jobs de revente dans la rue pour survivre. Et que les Européens n’ont pas de domestiques 🙂 mais font eux même la cuisine et la lessive pour la plupart. Pas évident de casser ces représentations mentales !
      En ce moment, nous avons d’autant plus ces conversations car nous nous occupons de jeunes qui vivent dans la rue. Ils ont beaucoup de questions sur l’Europe, et nous leur expliquons qu’il est plus facile de se donner les moyens de réussir dans son propre pays et sa propre culture.

      Vous pouvez suivre nos aventures sur les réseaux sociaux, et bientôt des articles sur ces sujets.
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      Bravo pour votre engagement en tous les cas !

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